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Entretien avec Martin Parr

28/04/2008 | Benjamin Favier

À l’occasion de la première édition, à Cannes, du Sony World Photography Awards, dont il est membre du jury, le photographe britannique Martin Parr, membre de l’agence Magnum, nous parle de la réédition de son pamphlet sur le tourisme, Petite planète (paru aux éditions Hoëbeke). Son regard sociologique à la fois acerbe et décalé en a fait l’un de ses thèmes de prédilection. Éternel révolté, Martin Parr nous explique les raisons de son engagement, dont la forme est proche du documentaire. Mais aussi de sa passion pour les livres photo. Avec la Croisette et son cortège de touristes en arrière-plan.

www.Lemondedelaphoto.com : une nouvelle édition de votre livre, Petite planète, vient de paraître. Pourquoi ce titre ?

Martin Parr : il fait référence au concept de mondialisation. Au fait de pouvoir voyager n’importe où, n’importe quand. Il y a de plus en plus de compagnies aériennes qui proposent des vols à bas prix. Voyager n’est plus un luxe. La planète paraît ainsi plus petite. Comme il s’agit d’une réédition (Petite planète est paru en 1995 ; cette nouvelle édition contient 30 clichés inédits), j’aurais même pu l’intituler "Encore plus petite planète" ou quelque chose dans le genre !

MDLP : L’adjectif " petit " peut être interprété de manière péjorative…

MP : Ce titre n’est ni négatif, ni optimiste. Il est réaliste. On a tous des images en tête, des clichés qui nous viennent à l’esprit, lorsque l’on part vers une nouvelle destination. Je veux simplement montrer le décalage qui existe entre la réalité des choses et la manière dont elles sont représentées.

MDLP : Sandra S. Phillips, auteur d’un ouvrage à votre sujet (Martin Parr, Collection 55, éditions Phaidon) déclare que vos clichés sont incisifs, sans être cruels. Pourtant, les touristes ne sont pas épargnés sur vos images. Quel message voulez-vous faire passer ?

M.P : Chacun est libre d’interpréter mes images comme il le souhaite. On peut les juger cruelles. mais quand vous regardez un guide d’agence de voyage, tout à l’air si beau, si parfait… on ne prend pas en compte la part d’improvisation, d’adaptation ou d’orientation inhérente à tout voyage. Mon travail s’inscrit en faux face à cette propagande. Mes images montrent les gens tels qu’ils sont.

« Le monde est suffisamment fou pour me permettre d’obtenir ce que je veux. »

MDLP : Une grande partie de votre travail repose sur la malnutrition, autre dérive de la mondialisation. Pourquoi vous focalisez-vous sur ce sujet ?

MP : Je m’intéresse beaucoup à la relation entre les êtres humains et la nourriture. La Grande-Bretagne n’est pas réputée pour la qualité de sa cuisine. Mais on trouve également de mauvais aliments en France et dans le monde entier ! Lorsque l’on va au supermarché, l’œil est attiré par les images alléchantes sur les emballages. Mes gros-plans, sur des saucisses industrielles, par exemple, peuvent choquer. Mon but est de mettre les aliments à nu. Sans trucage. Leur vente ne repose que sur des mensonges.

MDLP : Vous arrive-t-il de mettre en scène certains clichés ?

MP : Mon travail est très diversifié. Il m’arrive de couvrir des événements. Mais je me rends aussi dans des endroits très ennuyeux, en marge de l’actualité. Je ne fais jamais de mise en scène. Le monde est suffisamment fou pour me permettre d’obtenir ce que je veux.

MDLP : Vous êtes un grand collectionneur de livres photo. Croyez-vous à l’avenir de ce support face à la déferlante du numérique ?

MP : Internet permet en effet de voir et de télécharger des images gratuitement. Est-ce satisfaisant en terme de qualité ? La presse travers actuellement une crise grave. Il est de plus en plus dur pour les photographes de vivre de parutions. Sur un plan personnel, je fais des films, des publicités, de la vente de tirages… le livre restant le support le plus attrayant à mes yeux. Il s’agit d’un marché très restreint. De nombreux ouvrages ne trouvent pas leur public. Mais si une œuvre est bonne, elle est récompensée. Si un livre se vend à plus de 2 000 exemplaires, on peut considérer qu’il s’agit d’un succès.

MDLP : Vous sentez-vous à l’aise dans le monde de la photo numérique ?

MP : Je vis avec mon temps. Je travaille avec une Canon EOS 5D. Pour l’instant. J’attends de voir ce qui va venir dans les prochaines années pour le remplacer. Un modèle plus petit, qui proposera une qualité d’image encore meilleure.

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