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Yan Morvan, (grand) reporter de guerres

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29/07/2012 | Benjamin Favier

Le photojournaliste français revient dans ce livre sur les périodes les plus marquantes de sa carrière. Les plus brillantes comme les plus sombres. Avec lucidité et franchise.

Reporter de guerres : le titre fait écho au livre de Patrick Chauvel, Rapporteur de guerre (Oh Éditions). À l’instar de son compère, Yan Morvan revient sur quarante ans d’une riche carrière à travers un récit autobiographique, rédigé par l’écrivain Aurélie Taupin. Il est question des guerres que le photojournaliste a couvert aux quatre coins du monde. Mais aussi dans l’hexagone, où il faillit payer très cher son immersion dans les gangs de la banlieue parisienne…

Beyrouth, 1983. Photo : Yan Morvan

Âge d’or

« Morvan, Reza est blessé. Il a respiré des gaz à l’hippodrome. Il ne peut plus travailler. Tu pars à Beyrouth à sa place avec une garantie Newsweek. » Yan Morvan s’exécute, à la demande de Göksin Sipahioglu, disparu l’an dernier. Le photographe a rejoint Sipa au début des années 80. En 1982, il a déjà couvert des conflits en Iran et en Irlande du Nord. Mais ses fréquents voyages au Liban durant quatre ans l’affectent particulièrement. Lui-même reconnaît être devenu cynique. Il raconte, entre autres, un épisode au cours duquel il croise un ancien compagnon de route, photographe comme lui, à pied au bord de la route, tandis qu’il se rend sur la ligne de front dans un véhicule avec une collègue. Ils refusent tous les deux de le prendre à bord. Tout n’est pas rose à cette époque considérée comme un âge d’or pour le photojournalisme. La concurrence est féroce.


Belfast, 1981. Photo : Yan Morvan

Lucidité

La plume alerte d’Aurélie Taupin s’emballe ainsi dès le premier chapitre, consacré au Liban. Avant de revenir à l’enfance de Yan Morvan, puis à ses premiers pas en tant que photographe, dans un style moins enlevé, mais tout aussi plaisant. Le propos est franc, direct, précis. Lucide, le reporter se montre aussi dissert sur ses succès que sur ses ratés. Allant même jusqu’à se considérer comme un « vétéran has been » à 31 ans. Loin de la mythique réputation qui lui valu le surnom d’El Loco (le fou). Il parle sans détour du difficile retour au quotidien. De la nostalgie de ces aventures humaines épiques, bien que tragiques. Mais aussi de sa famille, matrice de ses choix.


Portrait de Guy Georges, le tueur de l’Est parisien, pris en 1995. Ce que le photographe ignore au moment de la prise de vue… Photo : Yan Morvan

Peur

Le danger, Yan Morvan l’a côtoyé à de nombreuses reprises tout au long de sa carrière, sur différents fronts aux quatre coins du globe. C’est pourtant en France qu’il subit sa plus grosse frayeur. Paris Match lui commande un sujet sur la fracture social. Pour cela, il s’immerge dans l’univers des gangs en banlieue parisienne, guidé par deux fixeurs recommandés par le journal. Mais au fur et à mesure que son travail progresse, il tombe dans un sacré pétrin : l’hebdomadaire refuse semaine après semaine de publier les images. Cela déplaît aux deux acolytes. Morvan devient une proie. Menacé. Tabassé. Traqué. Il prend la fuite avec sa famille…
Une vie d’aventurier, jamais romancée. Le récit passionne de bout en bout, si bien qu’on a du mal à lâcher le livre. Qu’il s’agisse d’un sujet sur des prostituées en Thaïlande, les Hell’s Angels ou la guerre photographiée à la chambre 4 x 5, on sent un homme dédié corps et âme à son métier. La fin de l’ouvrage laisse transpirer une certaine amertume. Voire des doutes quant au bien-fondé du travail des photojournalistes. Pourtant, les héritiers de talent ne manquent pas. Et leurs images prouvent le rôle essentiel des photojournalistes pour révéler à l’opinion publique les facettes méconnues de conflits loin de chez nous. Le travail de Laurent Van der Stockt, présent actuellement en Syrie pour Le Monde, le prouve. En attendant, on ne peut que chaudement recommander la lecture de cet ouvrage.

- Reporter de guerres
- Par Aurélie Taupin
- Éditions de la Martinière
- 15 x 22 cm
- 304 pages
- 16,90 €

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