Annoncé en septembre dernier le Nikon D6 sera disponible au printemps au prix de 7 299 €...le même tarif que son grand rival Canon EOS 1D-X-Mark III. Il s’agit d’offrir les derniers perfectionnements de la gamme reflex aux pros du sport, sans pour autant révolutionner le genre. On en restera à 20 Mpxl, l’antique « norme agence » A3 à 300 dpi...Mais Nikon a peaufiné tous les détails du flag ship.
Beaucoup rêvaient d’un reflex révolutionnaire, proposant une très haute définition et une cadence infernale, doté de la double visée optique et électronique, etc. Rien de tout cela en prenant en main un boîtier qui ressemble comme un frère au D5, avec un capteur et une ergonomie quasi-identiques. C’est sous le capot que des perfectionnements significatifs voient le jour en matière de capacité autofocus et de connectivité.
Le D6 s’adresse à une frange de la clientèle pro ou amateur passionné qui dispose vraisemblablement d’une (haute) gamme conséquente d’objectifs de course destinés au grand reportage, à la chasse photo en milieu hostile ou encore aux sports offrant des conditions de prises de vues délicates. On n’en est sans doute plus chez les deux seuls producteurs de ce type de « monobloc » de choc à imaginer que le nouveau modèle va provoquer des migrations d’une marque à l’autre...alors que les deux constructeurs ont communiqué sur l’avenir que dessinent les modèles mirrorless (sans miroir) et leurs nouvelles optiques dédiées. En revanche il s’agit de conserver les fidèles du reflex de course qui seraient tentés par les sans miroir...de course...produits par Sony. Et la présentation du D6 se double de celle du zoom 120-300 mm f/2,8 à lentille réfractive à faible longueur d’onde (SR). Si la gamme actuelle qui va du 200 mm f/2 au 800 mm f/5,6 en passant par les zooms FL 70-200 et 180-400 mm ne suffisait pas. L’outsider qui défie les deux poids lourds du puissant reflex pro ne dispose pas encore d’une gamme de téléobjectifs si étendue.
Si la prise en main et la visée confirment le sentiment que l’appareil est convivial quoique construit comme un coffre fort pour conserver les images, on s’aperçoit en parcourant les menus et les fonctionnalités annoncées dans la fiche technique que si la mécanique a évolué pour gagner en vitesse de pointe (14 images seconde contre 12 pour le D5). Le nouveau module autofocus multicam 37K gagne en densité de couverture d’image (mais pas en largeur) alors qu’il ne comporte plus que 105 collimateurs contre 153. Mais tous sont désormais en triple croix et sélectionnables. Nikon utilise deux processeurs sur le D6, le premier gère la chaîne d’image, le second est exclusivement dédié à la gestion de l’autofocus. Selon nous, c’est cette conception qui explique que sur certains suivis délicats les modules AF des reflex haut de gamme de la marque restent plus performants que les capteurs des Z, qui intègrent des photosites de détection de phase plus nombreux, et surtout gérés par un unique processeur qui doit alors piloter toutes les fonctions simultanément en plus d’un affichage électronique fluide. L’appareil semble donc très ciblé « pure photography » pour des sujets difficiles. Même s’il conserve les fonctions vidéo du D5, il restera en retrait sur ce plan des performances d’un Z6 proposé dans un séduisant « kit cinéma » ou même d’un D780 car en visée écran il ne dispose pas de détection de phase pour son autofocus. Contrairement à son rival Canon.
L’appareil sera commercialisé au printemps 2020 au prix estimé de 7 299 € TTC.
Nous avons pu effectuer une prise en main très rapide au cours de la conférence de presse, avec des gymnastes dans un lieu mythique : la première salle de sport à avoir introduit le basket en France. L’éclairage n’étant cependant pas la qualité première de ce local situé en sous-sol, malgré l’apport de quelques projecteurs, il a fallu monter la sensibilité de base au moins à 6 400 ISO si l’on veut opérer au 1/500 s à grande ouverture (f/2,8) pour figer un peu les mouvements. En fait disposant du boîtier pour quelques minutes et quelques déclenchement seulement, j’ai préféré bloquer un couple vitesse / ouverture au 1/1000set à f/2,8 (par sécurité) et laisser le boîtier gérer les Iso de manière automatique.
Globalement pas besoin de mode d’emploi si on a connu la saga des Nikon D à 1 chiffre. Les commandes sont proches de celles du D4 et du D5 et il faut aller dans les menus pour découvrir les nouvelles configurations de l’autofocus pour lesquelles il me semble qu’un petit temps d’apprentissage sera nécessaire pour bien les appréhender. Pas de configuration par défaut par styles de photo (football, course auto, athlétisme...etc) comme le proposent par exemple Canon ou Olympus, il faudra construire sa stratégie de groupes de capteurs et de réglages avancés.
La cadence rafale s’élève à 14 im/s et le suivi AF de reconnaissance des visages ont été choisis avec très peu d’erreurs. Il arrive en effet que parfois les mouvements masquent le visage mais l’appareil le récupère ensuite. Pas encore de logiciel pour ouvrir les RAW, mais les JPEG sont « sans histoire » et plutôt prometteurs. En usage presse il n’y aurait aucune difficulté pour faire une couverture de magazine sans trace de bruit chromatique à 25 600 ISO, et la balance de blancs a toujours respecté les tons chair. Avec un lissage un peu fort du bruit de luminance à mon goût, mais il est comme toujours possible de se créer un profil personnalisé.
Nikon a indiqué avoir particulièrement soigné les réglages pour l’obtention de JPEG directs prêts à l’envoi par Wifi, pour lequel le boîtier est configuré sans accessoire. Toutefois le transmetteur Wifi optionnel WT-6 en accroît les performances et peut communiquer en FTP avec des serveurs. Pas besoin de post-traitement pour envoyer son reportage au média qui a passé la commande. C’est le but visé. On peut même enregistrer ses JPEG en deux tailles simultanément, de manière à envoyer les petites pour une publication en petit format et optimiser les grandes pour un usage à postériori.
Dans l’attente d’un test plus complet, le D6 nous semble apporter des améliorations au D5 sans pour autant « renverser la table ». Ce n’est assurément pas un reflex universel pour tous les usages, et surtout pas pour tous les budgets, mais peut-être le dernier de cette génération si l’on croit les annonces déjà faites par Nikon sur la possible sortie d’un Z ciblé grand sport. En attendant il nous semble prêt à assurer de nombreuses années de bons et loyaux services.
Note à nos lecteurs : Fiche technique mise à jour le 12/02 à 14h14