En safari photo, quand le pisteur, de par sa connaissance du terrain et des animaux, vous pointe du doigt le lointain, vous ne voyez souvent qu’un fatras minéral et végétal. En son absence, la paire de jumelles est indispensable pour scruter le paysage et trouver l’animal qui vous a poussé à sortir des sentiers battus. Une recherche rapide sur le web laisse désemparé, car des modèles à moins de cent euros en côtoient certaines valant dix ou vingt fois plus. Il y a des raisons et ce livre vous les explique. Mais pas seulement. Il se pique de narrer l’histoire de cet appendice visuel depuis le début des années 1600, de vous en faire découvrir les secrets tant optiques que mécaniques. À ce propos il faut louer l’iconographie, tant par les étonnants documents d’époque, que les photos et les schémas montrant l’anatomie interne des jumelles.

On retrouve dans l’historique des noms familiers comme ceux de Voigtländer ou de Petzval, et l’on suit les étapes ergonomiques (comme le système d’écartement variable) ou l’introduction du prisme redresseur par l’Italien Ignace Porro en 1850. On s’amuse de la concurrence entre les marques, violation de brevets à la clé, et l’on suit l’évolution technique avec des jumelles à télémètres, d’autres dotées d’un système de stabilisation ou de vision nocturne. Rien que la lecture du premier chapitre est un régal. Et que dire des autres, soutenus par la connaissance pointue qu’ont les auteurs du sujet, qu’il s’agisse de parler de technique et d’usage.

Des mesures surprenantes

La paire de jumelles universelle existe-t-elle ? Si chacun souhaite « les jumelles les plus performantes, les plus légères et les moins chères possibles », le livre indique clairement que « ce mouton à cinq pattes n’existe pas ». Ce que montre un chapitre qui, pour chaque type d’utilisation, indique quels types de jumelles conviennent. Vient ensuite un copieux Guide d’achat, qui évalue 64 paires de jumelles (principalement des 10 x 42 et 10 x 50) avec les mesures réalisées sur plusieurs bancs optiques. Il débute par quelques dizaines de pages de considérations techniques pour comprendre les fiches descriptives et découvrir les arcanes de leur fabrication. On en trouve le prolongement et des tests plus récents sur le site.

Une chose étonne à parcourir les mires montrant le rendu en bordure : l’horrible qualité et aussi le rendu global des couleurs, loin de la neutralité. Si les mires au centre présentent des traits verticaux et horizontaux globalement satisfaisants, les autres relèvent dans leur quasi-majorité d’un rendu quasi fantomatique. Les auteurs notent les différents critères, affectent une note globale et commentent plus en détail leurs coups de cœur. On y constate que la qualité se paie cher, parfois le prix d’une optique photo haut de gamme (plus d’un millier d’euros). Un dernier chapitre s’attache à montrer des usages spécifiques, mettant souvent en œuvre, non pas des jumelles, mais une lunette d’observation, dont le montage sur un appareil photo ou d’un téléphone, relève du concept de la digiscopie.
Bien écrit, bien documenté, bien illustré, bien conçu… que dire de plus de cette mine d’informations écrite par un ingénieur en optique et un journaliste scientifique, que l’on prend plaisir à lire même si l’on n’est pas plus intéressé que cela par le sujet ou que l’on n’envisage pas un achat de jumelles.

 Sommaire

• L’histoire des jumelles
• Quelques bases d’optique
• Un peu de mécanique
• Quelle paire de jumelles pour quel usage ?
• Guide d’achat
• Bien utiliser et entretenir les jumelles
• Sortez des sentiers battus
• Glossaire

  Observer avec des jumelles, de Guillaume Blanchard et Jean-Luc Dauvergne

• 12,5 x 20 cm, 288 pages
• 25 €
• Édition Belin