Après la Turquie en 2011, puis le Maroc et enfin le Liban l’année dernière, c’est donc l’Italie qui constitue l’axe central de la quatrième édition de Photomed. Le festival varois, dont l’inauguration a eu lieu jeudi, proposera jusqu’au 15 juin une vingtaine d’expositions dans la ville de Sanary-sur-Mer, sur l’île de Bendor et à l’Hôtel des Arts de Toulon.
Fidèle à sa ligne éditoriale de mise en valeur des photographes méditerranéens et des photographies de la Méditerranée, Photomed est désormais un festival bien implanté, dans la ville de Sanary-sur-Mer, mais également dans tout le pourtour méditerranéen avec des expositions à Monaco en novembre et la tenue de Photomed Liban, qui va s’installer de façon récurrente à Beyrouth.
C’est au gré de leurs pérégrinations dans la ville de Sanary-sur-Mer, et ses alentours que les visiteurs de Photomed pourront découvrir l’ensemble des expositions de ce cru 2014. La cité balnéaire varoise, dont le maire aime rappeler qu’elle fait partie de ces rares communes à consacrer son plus gros budget à la culture, comprend onze des quatorze lieux d’exposition sélectionnés par Photomed.
C’est par exemple à la Maison Flotte, juste en face du port, que sont présentées Les petites îles italiennes hors saison de Bernard Plossu, et le reportage à Oran Les femmes de Sidi El Houari d’Arslane Bestaoui. Vaste lieu d’exposition, l’espace Saint-Nazaire reçoit sur ses trois étages iDissey de Stefano De Luigi, Songes et Visions et La Scène du Quotidien des cinq photographes italiens sélectionnés par Alessandra Mauro et la série de portraits Les Marocains réalisée dans son studio mobile par la photographe Leila Alaoui.
Parmi les expositions qui nous ont le plus séduits, on retient également le travail émouvant autour des martyrs de la révolution égyptienne de Denis Dailleux, à l’Atelier des artistes, ainsi que le cadre exceptionnel choisi pour Les villas Méditerranéennes, qui jalonne le chemin menant à la chapelle Notre-Dame de Pitié, avec une vue imprenable sur le port de Sanary-sur-Mer.
Au pied de cette montée, à la Maison du festival, ne manquez pas non plus l’exposition de Serge Najjar Réalités abstraites. Lauréat du concours Photomed-Beyrouth en janvier 2014, cet avocat libanais ne pratique la photographie que depuis trois ans, sur son temps libre. Lassé des photographies qui témoignent de la guerre dans son pays, de la reconstruction et du travail sur la mémoire collective, il souhaitait montrer un visage moderne de Beyrouth. Dans ses photographies d’architecture, il propose à la fois une vision très abstraite et graphique et une dimension humaine, la présence d’un personnage permettant à la fois de donner une échelle et une dimension vivante aux images.
Enfin, notons la superbe exposition de Mimmo Jodice Mediterraneo à l’Hôtel des Arts de Toulon dont nous détaillons le contenu dans la seconde partie de cet article.
Photomed 2014 se tient à Sanary-sur-Mer, Toulon et sur l’île de Bendor jusqu’au 15 juin. L’ensemble des expositions est accessible gratuitement. Le programme complet est disponible sur le site du festival : www.festivalphotomed.com
Invité d’honneur de cette édition 2014 de Photomed, Mimmo Jodice investit le cadre prestigieux de l’Hôtel des Arts de Toulon avec une exposition intitulée Mediterraneo. Elle restera accessible au public jusqu’au 22 juin.
Né à Naples en 1934, Mimmo Jodice débute la photographie dans les années 60. S’il s’est tourné vers la rue pour photographier les hommes et les femmes qui ont pris part à la révolution sociale italienne dans les années 70, c’est surtout pour ses photographies d’avant-garde, son approche plus métaphysique du médium photographique et ses recherches archéologiques sur le bassin méditerranéen qu’il est mondialement connu. Contrairement à la grande rétrospective qui lui a été consacrée à la MEP en 2010, l’exposition qui se tient à l’Hôtel des Arts de Toulon fait l’impasse sur la dimension sociale de l’œuvre de Jodice pour se concentrer uniquement sur son travail autour des vestiges archéologiques et des visages antiques méditerranéens.
C’est à l’aide d’un appareil moyen-format, fixé sur un trépied et chargé en noir et blanc, avec du film Ilford PanF 50 Iso que Mimmo Jodice réalise ses photos. Si ses sujets peuvent sembler statiques, il n’en est rien du résultat final de ses épreuves qui dégagent beaucoup de force, d’intensité et de mouvement. « On peut faire parler les pierres », nous explique-t-il alors que nous parcourons ensemble l’exposition en cours d’accrochage. Les statues qu’il photographie, Mimmo Jodice les voit comme des êtres vivants. Pendant qu’il expose sa pellicule, il n’est pas rare qu’il les éclaire avec une lampe de poche, donnant une impression de présence dans ces vestiges. Très soucieux de la lumière dont il joue à la prise de vue, Mimmo Jodice est également un tireur patient et méticuleux. C’est d’ailleurs lors de cette étape du laboratoire que se crée le style si particulier de ses images. Caractérisé par un effet de mouvement, dans certaines zones de l’image seulement, Mimmo Jodice nous explique qu’il lui faut parfois refaire dix à quinze fois un tirage avant d’obtenir le résultat désiré. Le mouvement, il le crée en déplacement sa feuille sous l’agrandisseur, soulevant un angle ou un bord pour affecter une partie de l’image et pas une autre. Les tirages qu’il présente lors de l’exposition sont en cela uniques, tant il est difficile de reproduire à l’identique les gestes opérés sous l’agrandisseur. Par cette pratique, le Napolitain réussit à nous montrer beaucoup plus que des vestiges ou des pierres. Ses photographies sont hors du temps et révèlent ses pensées, expriment des sentiments. Sublimée par la cadre exceptionnel de l’Hôtel des Arts de Toulon, l’exposition de Mimmo Jodice Mediterraneo donne à voir, mais également à imaginer et à ressentir toute une vie passée.
Le site de l’Hôtel des Arts de Toulon