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Rhiannon Adam : « Ne secouez jamais un Polaroid »

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10/11/2017 | Sandrine Dippa

Rhiannon Adam est obsédée par les Polaroid, qu’elle maltraite à des fins artistiques depuis plus de dix ans. La photographe anglaise est aussi l’auteure du Grand Livre du Polaroid qui vient de paraître aux éditions Eyrolles. Rencontre.

Le Monde de la Photo : Racontez-nous comment vous êtes devenue accro au Polaroid ?
Rhiannon Adam : J’ai grandi en faisant le tour du monde en bateau avec mes parents. Nous n’avions pas beaucoup d’argent, je n’ai donc jamais pu immortaliser les lieux magnifiques que nous découvrions. Je n’ai d’ailleurs aucune photo de moi entre mes 7 et mes 15 ans. Pour me souvenir de nos voyages, je collectais des objets que je trouvais sur place. Lorsque j’ai commencé à travailler pour une chaîne de télévision, on m’a autorisé à utiliser les films instantanés destinés aux shoots à des fins personnelles. Je me suis alors rendu compte que prendre des photos avec un appareil instantané était assez similaire à la façon dont je collectionnais les vieux objets quelques années plus tôt : ça me permettait de garder une trace d’un moment précis.

MDLP : Il y a quelques années, vous pensiez que l’avènement du numérique avait achevé l’argentique et la photographie instantanée. Faites-vous aujourd’hui le même constat ?
R.A : C’était le cas il y a quelques années. Ça ne l’est plus aujourd’hui, car les deux coexistent. Je pense d’ailleurs que si Edwin Land était vivant il aurait probablement fabriqué des appareils numériques, car il voulait avant tout que la photographie soit accessible à tous. Nous vivons dans un monde où le numérique est omniprésent notamment avec les réseaux sociaux comme Instagram ou Facebook. La photographie argentique reste donc un moyen de partager un moment plus intime et vrai, car nous avons clairement besoin de revenir à des choses plus réelles. Dans ce sens, la photographie instantanée n’est donc plus une alternative au digital. Elle touche d’ailleurs différentes générations, y compris les plus jeunes. Des appareils comme le One Step 2, par exemple, ont sans doute été créés pour initier ces nouvelles générations.

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Du vernis à ongles est injecté dans les gousses du film instantané au cours du développement. Photo : Rhiannon Adam


MDLP : Dans votre livre, vous évoquez différentes technologies permettant de générer des images instantanément (SX-70, 600, imprimantes, Instax...). Qu’utilisez-vous en tant qu’artiste ?

R.A : J’utilise principalement un SX-70 de la marque Mint. Un de leur appareil possède une optique en verre permettant de choisir entre une exposition automatique ou le contrôle manuel la vitesse d’obturation. C’est donc le boîtier instantané parfait ! De plus, il est très fiable : tout ce qu’on voit dans le viseur est ce qui va se retrouver sur l’image, ce que peu de gens savent. Ils pensent encore que les viseurs des appareils instantanés ne sont pas fiables et que la qualité de l’image produite est mauvaise. J’utilise aussi un 180 (à film en pack) datant de la fin des années 60 trouvé sur eBay. Le rendu est différent, moins net, mais tout aussi intéressant.

MDLP : Vous restez donc fidèle à Polaroid. Êtes-vous cependant ouverte aux autres supports tels que l’Instax ?

R.A : L’Instax est simple à utiliser et très intuitif : la plupart du temps, la photo est réussie. C’est sympa, mais pour moi, ce procédé est surtout parfait pour les photographies de fête ou pour les images à afficher sur son réfrigérateur avec un magnet. Il réunit un peu tout les clichés qui peuvent parfois coller à la peau du Polaroid et qui m’ont donné envie d’écrire le livre afin de les briser. Avec l’Instax, on perd un peu de ce qui fait la magie de Polaroid c’est-à-dire l’aspect inattendu que peuvent avoir les photos. De plus, on ne peut pas vraiment s’amuser de manière créative, car le film ne peut pas être manipulé à cause de sa chimie. Ce format est limité. Je ne l’utilise donc pas.

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Une double exposition créée avec du film instantané Polaroid expiré.
Photo : Rhiannon Adam

MDLP : Parmi les nombreuses techniques évoquées, quelles seraient les plus simples à mettre en œuvre pour un novice ?
Le transfert de transparent est très simple à mettre en œuvre pour les débutants, car on a pas besoin de beaucoup de matériel : une photo, des ciseaux et un sèche-cheveux suffisent. Cette technique consiste à décoller l’émulsion. Les résultats sont vite visibles. Pour ceux qui s’y connaissent un peu, le light painting, peut aussi facilement être mis en œuvre.

MDLP : Dans la préface du Grand Livre du Polaroid, vous écrivez : « Ne secouez jamais un Polaroid » Pourquoi une telle mise en garde ?
R.A : Lorsque les premiers appareils Polaroid ont été lancés dans les années 40, on les secouait pour les faire sécher. De même que les packs films. La chimie des films plus récents est différente : elle est contenue entre deux surfaces situées à l’arrière et à l’avant du film. Si le film est secoué, elle se déplace, ce qui ne fait pas sécher la photo, mais l’endommage. Contrairement à ce qu’on pense, quand l’image sort de l’appareil elle est déjà sèche. Ne secouez donc jamais un Polaroid !

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Les photos instantanées en développement peuvent être placées dans un micro-ondes pour créer des brûlures et accélérer leur développement.

Propos recueillis par Sandrine Dippa

À lire, notre dossier consacré à la photographie instantanée dans le numéro 101 de MDLP, en kiosque demain !

Le grand livre du Polaroid de Rhiannon Adam
Éditions Eyrolles, 2017
Français
18 x 22 cm, 240 pages
Prix : 26,90 €
Crédit image d’accueil : Portrait de Rhiannon Adam pris avec un Polaroid 20x24’’.
Photo : John Reuter

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