Présenté en ouverture du salon vidéo NAB, l’Alpha 7S mettait évidemment en avant sa spécificité dans ce domaine : c’est le premier compact à objectifs interchangeables capable de capturer en 4K sur un capteur 24 x 36 mm sans mise à l’échelle de l’image. Mais au vu des détails de cette fonction, nous nous demandons si son destin ne serait pas plutôt la photo impossible…
Les annonces de capteurs capables de capturer en définition 4K se multiplient, quelle que soit leur taille ; pourtant, les appareils filmant effectivement 4K restent rarissimes — Canon EOS 1D C, Panasonic GH4, Sony AX100… et bien sûr les caméras professionnelles. La raison ? Tout simplement les limites de l’électronique qui, en aval du capteur, doit traiter et compresser les données vidéo.
L’Alpha 7S est symptomatique de cette tendance. Il reçoit un tout nouveau capteur de 12 Mpxl spécialement conçu pour associer lecture rapide (30 im/s en pleine définition) et haute sensibilité. Mais le processeur chargé de compresser les vidéos et peut-être le lecteur de cartes mémoire, eux, n’ont pas un débit suffisant pour gérer ces données : l’Alpha 7S est limité au Full HD à 60 im/s et au HD 720p à 120 im/s. Le résultat, c’est ce petit paradoxe : un appareil lancé dans un salon vidéo, avec un gros accent sur son capteur 4K, est incapable d’enregistrer lui-même une vidéo ultra haute définition sur une carte mémoire. Il ne peut que la renvoyer par la prise HDMI vers un enregistreur externe.
Cela limite-t-il réellement l’appareil ? Oui et non. Ceux qui filment en 4K, pour l’heure, sont principalement des professionnels habitués à utiliser des caméras avec un lot d’accessoires, et l’enregistrement externe n’est pas un problème. La principale limitation, dans ce cas, est le choix de Sony de se contenter du 4K UHD : la marque ne propose toujours pas de 4K DCI, format standard du cinéma, en dehors de la gamme de caméras CineAlta. Dans ce domaine, Panasonic a peut-être eu du flair : son GH4 propose le choix entre 4K UHD et 4K DCI, ce qui lui permettra de s’intégrer plus facilement dans un flux de travail cinéma.
Plus anecdotiquement, notons que si la possibilité de capturer la vidéo 4K sans interpolation (un photosite donne un pixel) devrait améliorer la qualité d’image, elle a une conséquence sur la taille du cadre enregistré : l’Alpha 7S garde alors 3840 pxl d’un capteur qui en compte 4240, perdant 10 % du champ horizontal — la fenêtre de capture devrait faire 18,1 x 32,2 mm.
D’autres fonctions vidéo sont proposées, comme le gamma S-log2 permettant de mieux profiter de la dynamique du capteur ou l’enregistrement en HD 1080p en XAVC S, dont le débit plus élevé préserve mieux l’image que le classique AVCHD.
C’est finalement peut-être sur les aspects photographiques que l’Alpha 7S pourrait se distinguer : sa définition est limitée à 12 Mpxl. Pour l’anecdote, on note ainsi que trois jumeaux, les Alpha 7S, 7 et 7R, proposent une progression arithmétique : 12, 24 et 36 Mpxl.
Donnée plus intéressante, cette définition modeste permet à ses photosites de dépasser les 8 µm, une taille plus vue depuis les Nikon D3, D700 et D3s (ce dernier fut le premier appareil à franchir le pas des 100 000 Iso). Cela devrait permettre de repousser la saturation, donc d’accroître la dynamique, tout en augmentant la sensibilité ; Sony annonce 102 400 Iso en plage normale et une extension à 409 600 Iso. Sur le papier, l’Alpha 7S devrait être proche, voire légèrement meilleur que le Nikon D4s, la référence absolue du moment en basse lumière.
Mieux, l’Alpha 7S pourrait également résoudre une faiblesse du D4s : la mise au point en basse lumière. Il annonce un autofocus (par détection de contraste uniquement) sensible jusqu’à -4 IL, deux crans de mieux que le Nikon. Notre expérience ayant montré que le module autofocus du D4s, malgré sa sensibilité remarquable, décroche dans des conditions où il est encore possible de photographier à main levée à 200 000 ou 400 000 Iso, nous sommes impatients de voir le résultat du nouveau venu…
Sony n’a pas, pour l’heure, annoncé de tarif pour son dernier rejeton, pas plus que pour le 28-135 mm f/4 Powerzoom en cours de développement, dont on ne sait rien de plus que son nom.
L’Alpha 7 est un appareil agréable et Sony l’a bien compris : inutile de ré-inventer la roue, mieux vaut décliner un modèle connu et apprécié. Du coup, c’est exclusivement sur ses entrailles qu’il conviendra de juger l’Alpha 7S. Son nouveau capteur pourrait être une des références absolues en matière de sensibilité et faire de l’Alpha 7S un appareil apprécié des photographes nocturnes — voire des amateurs de sport en salle, si jamais l’autofocus se révélait plus vif que sur l’Alpha 7R.
La capture 4K est également bienvenue, mais la fonction semble finalement peu aboutie : l’absence d’enregistrement interne destine l’appareil aux productions professionnelles habituées à gérer moult accessoires (dont des enregistreurs externes), mais le 4K limité au standard UHD plutôt que le format DCI utilisé au cinéma renvoie plutôt l’appareil aux productions télévisées… L’Alpha 7S, un appareil conçu pour tourner des téléfilms : étonnant !