Nous avons eu l’occasion de prendre en mains le dernier né de la gamme Lumix G, à Tromsø, au nord de la Norvège. Bien qu’il s’agissait d’une version non finalisée du firmware, nous avons pu manipuler le G9 dans différentes situations : basses lumières, température proche de 0°, projection d’embruns… Petit aperçu de nos premières impressions en images.
Au premier trimestre de cette année, Panasonic a beau eu mettre l’accent sur le potentiel « photographique » de son GH5, boîtier phare dans la gamme Lumix G, bon sang ne saurait mentir : les GH sont d’abord perçus comme des appareils doués en vidéo. Jusqu’ici, en considérant la gamme Lumix, ceux qui ne jurent que par la photo pouvaient se rabattre sur le GX8, sobre et efficace, ou l’étonnant G80, qui constitue certainement l’un des meilleurs rapports qualité/prix, tous boîtiers à optiques interchangeables confondus. Entre ces deux modèles et le GH5, la firme d’Ōsaka intercale donc le G9, en mettant l’accent sur ses aptitudes en matière de prise de vue fixe. Sous-entendu, il serait supérieur au GH5, lancé en début d’année, bien que ce soit le même capteur, qui officie en interne : un Live Mos de 20 Mpxl, sans filtre passe-bas, dont la plage de sensibilité s’étend par défaut de 200 à 25 600 Iso (dommage qu’il ne descende pas par défaut à 100 Iso, valeur accessible par extension). En revanche, le processeur évolue, le G9 héritant d’une nouvelle version du Venus Engine. D’où, selon Panasonic, une meilleure dynamique et de meilleures performances en hautes sensibilités par rapport au GH5.
Présenter ce produit sur le territoire des chasseurs d’aurores boréales où il n’y a que trois ou quatre heures de lumière par jour en cette saison, constitue un pari risqué de la part du fabricant. La prise de vue en hautes sensibilités n’est pas vraiment le point fort des boîtiers Micro 4/3. Malgré d’évidents progrès effectués dans ce domaine, par exemple entre les GH4 et GH5, nous avions situé (lire ici), sur ce dernier, les limites à partir de 3200 Iso – en Jpeg du moins, les Raw permettant de récupérer plus de matière.
Il s’agit ici d’un firmware non finalisé, donc nous ne tirerons pas de verdict définitif au regard des images effectuées en hautes sensibilités avec le G9. En l’état, si progrès il y a, l’examen des fichiers à 100% ne révèle rien de spectaculaire. Étant donné la légèreté du système Micro 4/3, nous conseillerons (comme nous le faisons depuis notre test de l’Olympus E-620 à bord du Transsibérien), d’avoir avec soi un trépied de type Gorillapod, qui convient bien au gabarit du G9 avec le 12-60 mm.
Voici une caractéristique, absente sur le GH5, susceptible d’intéresser les aficionados d’images fixes : l’apparition d’un mode Haute résolution, pour obtenir des fichiers de 80 Mpxl (ou 40 Mpxl), en prenant huit clichés consécutifs, directement assemblés dans le boîtier à l’issue de la prise de vue. Ce qui donne des fichiers de 10 368 x 7 776 pixels, contre 5 184 x 3 888 pixels, quand on exploite la définition native du capteur (20 Mpxl, format 4/3). Il est possible d’opter pour une définition intermédiaire de 40 Mpxl (mode LL via la fonction Haute Résolution), avec des fichiers de 7 296 x 5 472 pixels à la clé.
Une fonction pertinente en paysage ou en nature morte, à condition d’avoir un trépied, évidemment indispensable dans ces conditions. À noter, il n’est pas possible de descendre en dessous de 1s lorsque le mode Haute résolution est activé, ce qui nous a empêché de tester cette fonction sur les aurores boréales, pour lesquels des temps de pose de 4 à 50 s étaient privilégiés pour obtenir des expositions correctes en mode Manuel (lire plus loin).
S’il fallait ne retenir que deux points forts du G9, la qualité de construction du boîtier et l’excellente autonomie sortiraient naturellement du lot. À l’occasion d’une croisière le long des fjords, dans les environs de Skjervoy, au Nord-Est de Tromsø, nous avons passé au moins 5h sur le pont, sans interruption (sauf pour aller changer d’optique dans la cabine), bravant tempêtes de neige, embruns, vent frais et fort la majeure partie du temps, sans protéger une seule fois le G9 et le grip, alternativement muni des 12-60 mm f/2,8-4 et 200 mm f/2,8.
Construit en alliage de magnésium et paré de joints d’étanchéité, le G9 remplit parfaitement le cahier des charges d’un boîtier pro. En outre, le crantage des molettes, la solide fixation de l’œilleton et le fait de pouvoir rabattre l’écran LCD pour le protéger rassure lorsqu’on est balloté par la houle, le vent et que le boîtier pend au cou.
Autre satisfaction, la batterie Li-Ion de 1 860 mAh. En se passant volontairement du mode éco – impressionnant sur le G80 – nous avons pu tranquillement effectuer le trajet aller et retour en bateau, en engrangeant quelque 444 images, sans faire de vidéo et sans consulter les fichiers à l’écran. Seul l’accu logé dans le grip a été mis à contribution, et il restait encore de la réserve une fois de retour sur la terre ferme. Si un chargeur est fourni, il est par ailleurs possible de recharger le G9 en USB 3.
Les 12-60 mm f/2,8-4 et 200 mm f/2,8 OIS étaient tous les deux compatibles avec le système de stabilisation Dual IS 2 du G9, malgré une version non finalisée du firmware. Nous avons pu effectuer des clichés nets à main levée (pas à bord du bateau !), sous les 4s, avec le 12 mm f/1,4 (donc équivalent à un 24 mm en 24 x 36), qui n’est lui pas stabilisé pour le coup.
Tandis que dans des conditions de forte houle, avec le 12-60 mm calé à la plus longue focale (soit 120 mm en équivalent 24 x 36), nous avons obtenu des photos de paysages nettes avec un temps de pose de 1/125s. Dans ce registre, le GH5 nous avait déjà bluffés, la quasi totalité des plans de notre sujet vidéo sur les gauchos ayant été tournés à main levée.
Avec un mode Rafale annoncé à 20 im/s en autofocus continu (AFC) – jusqu’à 60 im/s en AFS ! –, le G9 entend jouer dans la même cour que le Sony A9, parmi les hybrides haut de gamme. Nous attendrons une version de firmware définitive pour vérifier au chronomètre si cette cadence est respectée. En attendant, nous avons pu réaliser quelques tests de l’AF dans diverses conditions. Notamment à bord d’un bateau en pleine mer de Norvège, avec le 200 mm f/2,8 (400 mm en équivalent 24 x 36). L’autofocus DFD à 225 collimateurs, qui repose sur de la détection de contraste, a rendu une copie très encourageante. En optant pour une vitesse minimale de 1/1 000s, afin de compenser le tangage sur les eaux agitées, les bourrasques de vent, et afin de figer quelques silhouettes de mouettes en plein vol, le suivi est bon : très peu de déchets sur les différentes séries. Mais après avoir touché au Nikon D500, on sait qu’il est possible de frôler le sans faute, du coup, l’exigence a monté d’un cran… À noter, l’absence d’éclipses pendant les rafales. On garde en permanence le contact avec le sujet suivi, comme avec un Sony A9.
Le mode AF-C s’est également révélé efficace pour capturer des orques en train de jouer à cache-cache. La présence d’un joystick pour piloter les collimateurs est très appréciable, nous l’avions souligné sur le GH5. Néanmoins, il est placé un peu trop près de l’œilleton en caoutchouc à notre goût : il y aurait eu de la place pour le ramener un peu plus vers la droite. Même sentiment concernant la roue arrière, qui aurait pu être placée un peu plus bas : ainsi, elle est difficilement accessible lorsqu’on utilise le grip optionnel en position verticale.
Il faut s’habituer au déclencheur, particulièrement sensible : lorsqu’on opte pour une mise au point à mi-course, plutôt que de confier la mise en route de l’autofocus à une touche, il on a vite fait de prendre une image sans le vouloir. Cela surprend, les premiers instants, mais on finit par en prendre la mesure.
Principale attraction de cette région du Nord de l’Europe, les aurores boréales. À l’aide d’applications dédiées (il en existe plusieurs gratuites, comme Aurora, sous iOS et Android), on glane des informations assez précises (couverture nuageuse, vitesse du vent solaire…) en temps réel pour savoir ou pas si on a une bonne chance d’en apercevoir. Toujours est-il qu’il vaut mieux faire confiance aux spécialistes locaux pour optimiser ses chances, surtout quand on a que deux fenêtres de tir. En prenant nos distances avec le centre ville de Tromsø (une trentaine de minutes en bus), nous avons pu photographier ce spectaculaire phénomène lumineux.
Reste à marcher un peu et trouver un endroit pour positionner son trépied. Pour que les éclairages de de Tromsø, particulièrement intenses, ne polluent pas l’image. Une lampe frontale est indispensables dans ces conditions, pour évoluer dans la neige, de nuit d’une part, mais aussi pour paramétrer le boîtier ! Panasonic a certes eu la bonne idée d’avoir placé un LCD de contrôle sur le dessus, rétroéclairé, à l’instar de ce que proposent les reflex experts Canon, Nikon ou Pentax. En revanche, oubli coupable que de n’avoir pas procédé de la sorte avec les touches… en déportant l’écran sur le côté, on ne voit absolument rien au dos du G9. Bien sûr, une fois l’ergonomie assimilée, on agira facilement dans l’obscurité. Mais lorsqu’on effectue ses premiers pas, qui plus est dans le froid, une source d’éclairage d’appoint n’est pas de trop.
Pour photographier les aurores boréales, nous disposions du 12 mm f/1,4. Une excellente focale fixe, solidement construite, munie d’une bague de diaphragme. En mode manuel, avec le retardateur calé sur 2 s pour éviter tout flou de bougé, nous avons réalisé plusieurs séries avec des temps de pose de 15 s à 50 s. En activant la réduction du bruit pour les longs temps de pose, le temps de traitement est assez long avant de pouvoir enchaîner sur une autre prise de vue. Nous l’avons donc désactivé, en enregistrant simultanément en Raw, et agir sur la réduction de bruit par la voie logicielle (il n’est pas encore possible de développer les fichiers RW2 du G9). Dans le même esprit, on privilégie alors la balance des blancs automatique, quitte à la modifier a posteriori (quelques essais avec une température de couleurs « tungstène » donnaient des résultats satisfaisants).
Autre fonction intéressante l’intervalomètre, accessible via un sélecteur placé sous le barillet de réglage, où une fine couronne rouge fait office d’intercalaire. À raison d’un déclenchement toutes les six secondes sur deux cents ou trois cents vues, on observe bien l’évolution rapide du phénomène sur la séquence MP4 assemblée en interne. On peut interrompre le time-lapse à tout moment en pressant la touche Fn2, et la générer in situ. Sauf si on a basculé d’une carte à l’autre pendant la réalisation du time-lapse : à l’issu de l’enregistrement, le boîtier signifie qu’il est impossible de monter la séquence. Mais les fichiers (Raw et Jpeg) figurent bien évidemment sur les SD et on pourra effectuer l’assemblage a posteriori.
Aurore boréale_1 from Vincent Trujillo on Vimeo.
Autre souci constaté avec les cartes mémoire, même en ayant activé la fonction de débordement vers le deuxième compartiment une fois le premier espace de stockage rempli, la mention « SD1 Full » clignote en rouge, alors que l’on enregistre sur la seconde carte… il suffirait de lire la mention SD2, dans un coin, discrètement, pour comprendre que l’on a bien basculé d’un compartiment à l’autre. Comme il s’agit d’un firmware non finalisé, espérons que ces deux points feront l’objet d’une correction.
En enchaînant poses longues et time-lapse trois heures durant, nous avons à nouveau apprécié l’endurance de la batterie. À noter qu’il est d’ailleurs possible (sur le GH5 aussi), de changer de batterie en plein milieu d’un time-lapse ; celui-ci s’interrompt et lorsqu’on relance le boîtier, il est possible de reprendre à partir de l’endroit où l’on s’est arrêté. Bien vu.
Sans surprise, le G9 est pourvu de fonctions WiFi et Bluetooth, pour communiquer avec l’application Image App. Celle-là fait partie des plus complètes à l’heure actuelle, pour piloter son boîtier en photo ou en vidéo. Les bonnes capacités de l’accu du G9 aidant, cela incite aussi à transférer ses fichiers vers son smartphone à l’issue d’une session, pour les partager une fois revenus à la civilisation. Si la mise en route n’est pas assez instinctive en WiFi, le transfert des fichiers est suffisamment rapide pour envisager l’envoi de deux à trois centaines d’images depuis le boîtier.
Construction, autonomie, stabilisation, gamme optique : voilà quatre piliers forts sur lesquels le G9 peut s’appuyer. Parmi les autres satisfactions, il faut saluer la qualité du viseur EVF de 3,68 Mpts (avec un grossissement amélioré par rapport au GH5, puisqu’on passe de 0,70x à 0,83x et un taux de rafraîchissement optimal en mode Rafale), ainsi que de l’écran arrière, orientable dans toutes les directions et tactile (même si la compatibilité HDR reste l’apanage du LCD du GH5). En termes de gabarit et d’ergonomie, le boîtier tient plus du reflex que de l’appareil sans miroir traditionnel : la présence d’un LCD de rappel, rarissime sur les hybrides (le Leica SL et le Fujifilm GFX 50S en ont un, mais ils boxent dans une autre catégorie), accentue cette impression. La prise en main est excellente, le grip étant mieux dessiné, plus creusé que celui du GH5 – on retrouve les sensations éprouvées avec le G80. L’ergonomie semble à la fois inspirée du GH5 et du G80, et l’apparition d’un joystick (le GH5 en est aussi pourvu) est une très bonne chose, même s’il n’aurait pas été absurde de le décaler un peu plus vers la droite, à notre avis.
Mais face à un Olympus OM-D E-M1 Mark II, concurrent le plus direct du G9, avoir le LCD et le joystick constitue un avantage qui ne laissera pas les utilisateurs de reflex insensibles. Au dos du boîtier, la roue arrière est placée un peu trop haut : on le remarque en utilisant la poignée optionnelle, et il faut alors « aller la chercher » en faisant le grand écart avec le pouce.
Tout comme il faut s’habituer à la sensibilité du déclencheur, lorsqu’on opte pour la mise au point via une pression à mi-course. L’accès direct à l’obturateur électronique, sur la face avant gauche, est pertinent. Quant au volet connectique, il n’a rien à envier aux boîtiers pros (prise Ethernet exceptée) : Panasonic aurait peut-être pu privilégier la prise USB-C en lieu et place du classique port USB3, mais l’essentiel est là. Espérons que la mise à jour finale aura corrigé les bugs signalés pour ce qui est de la gestion des cartes mémoire (lire paragraphe « Time-lapse » plus haut).
Les premier essais effectués en mode Rafale avec l’autofocus continu sont encourageants. Nous attendrons de mettre la main sur un exemplaire finalisé du boîtier pour chronométrer et vérifier que les 20 im/s annoncées en AFC sont tenues. De même, les essais de mise au point à l’aide de l’autofocus en basse lumière demandent à être approfondis. Avec le 12-60 mm f/2,8-4, l’AF s’est fait piéger à plusieurs reprises, dans les rues illuminées de Tromsø. Nous en profiterons aussi pour confronter le G9 au GH5, en termes de qualité d’image. En l’état, sans pouvoir exploiter les Raw (les Jpeg, dès 3200 Iso, révèlent un lissage trop important), difficile de dire si le G9 fait bien mieux que son aîné. Nous évoquerons également dans le détail le mode vidéo : on oublierait presque cette fonction sur le G9, pourtant, bien que moins pourvu en fonctionnalités dans ce domaine que le GH5, il offre une panoplie des plus complètes au regard de ce qui est proposé par les concurrents. Les plus directs étant l’Olympus OM-D E-M1 Mark II et les deux boîtiers APS-C que sont les Sony A6500 et Fujifilm X-T2. Reste à savoir quelle sera la place du GH5, alors que les rumeurs d’une version « S » se font de plus en plus insistantes…